La sculpture d'Henri Gautheret est une œuvre de rigueur.
Il l'a lui-même qualifiée "d'austère".
Un coup d'œil superficiel y voit quelque chose de géométrique,
de mécaniste, peu enclin à l'effusion, à l'expression
des sentiments. Cependant à y regarder de plus près
certaines de ses formes ne manquent pas de sensualité,
de cette sensualité qui, outre l'œil, s'adresse à la
main, au toucher, ce sens si peu sollicité par l'art
: les polis, les rugueux, les rondeurs.
Et puis il y a un domaine par lequel cette œuvre abstraite
s'enracine dans le concret, c'est le choix du matériau
: calcaire de Bourgogne (Chassagne, Corton, St-Maurice-les-Châteauneuf...)
Volvic, Granit (Vaugnerite, du Tarn, Labrador, Indien,
Noir Marlin, Lanhelin...), travertin, marbre de Carrare...
il y a un goût pour la matière, pour sa couleur, pour
son grain, pour sa consistance, pour sa réaction à la
taille, que l'on pourrait comparer au goût de l'amateur
pour la diversité des bons vins.
En dernier lieu, il a choisi le bois pour certains de
ses signes. Il dit que c'est une question de poids:
il est certain qu'à volume égal, le bois est plus léger
que la pierre et pour le transport ...
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Mais il y a de sa part, sûrement, une curiosité pour
une matière différente dont il obtient des effets par
des traitements de surface cirés ou cérusés.
Au travers de l'évolution de son œuvre, de ses métamorphoses,
c'est bien le sentiment que l'on éprouve : quelque chose
de lentement mûri, de pensé.
Il dit que la phase la plus passionnante, c'est celle
de la conception, de la recherche de solutions à apporter
aux problèmes qu'elle pose, le travail dans la tête
et sur le papier, et qu'au bout du compte, la réalisation
ne vient que de surcroît.
On frôle ici l'art conceptuel ! Heureusement, Henri
Gautheret incarne ces conceptions dans la matière.
Il les incarne avec une remarquable économie de moyens,
une sorte d'ascèse que l'on pratique lorsqu'on est à
la recherche de l'absolu.
C'est Voltaire, je crois, qui a dit que Dieu était géomètre
!
Pierre
DALLAIRE
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